Du mont-de-piété au Crédit municipal : découvrez l’histoire du prêt sur gage
Retour sur les principaux épisodes de cette bataille, au terme de laquelle les caisses de Crédit Municipal ont obtenu le monopole en matière de prêt sur gage.
1462 : la création du premier mont-de-piété en Italie
Le premier bureau de prêt sur gage est officiellement né en 1462 en Italie, dans la ville de Pérouse, sous l’impulsion de Barnabé de Terni.
Pour combattre les usuriers qui prêtaient alors à des taux de plus de 130 % par an, ce moine récollet a l’idée de créer le premier Monte di Pietà.
La mission de cette institution financière d’un nouveau genre est de prêter de l’argent gratuitement ou à faible taux contre le dépôt d’un objet en garantie.
Le griffon : l’emblème historique du prêt sur gage
Le mont-de-piété de Pérouse adopte alors l’emblème de la ville qui l’a vu naître : le griffon, une créature légendaire avec une tête d’aigle, un corps de lion et des ailes.
Cette nouvelle institution ne pouvait choisir un meilleur gardien, puisque cet animal puissant était chargé dans la mythologique grecque de veiller sur les trésors du dieu Apollon.
Aujourd’hui encore, le griffon est le symbole des caisses de Crédit Municipal, qui ont pris le relais des monts-de-piété !
Le développement contrarié des monts-de-piété en France
En France, le premier mont-de-piété naît en 1610 à Avignon.
En 1612, Lille fonde à son tour un mont-de-piété financé par Bartholomé Masurel, « bourgeois et manant de la ville de Lille », avant d’en ouvrir un second en 1628.
À Paris, le mont-de-piété ouvre ses portes en mars 1637 sous l’impulsion de Théophraste Renaudot, médecin de Louis XIII et ami de Richelieu.
En 1643, le Roi autorise 58 villes à créer de tels établissements. Mais après la mort de Louis XIII, les opposants de Théophraste Renaudot – au premier rang desquels figurent les usuriers – obtiennent la fermeture des monts-de-piété.
L’essor des monts-de-piété au XIXe siècle
En 1777, Louis XVI rétablit l’institution, qui sera confirmée par Napoléon Ier.
La loi du 16 février 1804 prévoit la fermeture des officines privées de prêt sur gage et offre aux monts-de-piété le monopole de l’activité. Alors qu’il en existait seulement 22 en 1790, on en dénombre 45 en 1850 !
Le mont-de-piété de Bordeaux est inauguré le 1er décembre 1801. Celui de Nice est créé en 1809 grâce à un fonds provenant d’un prélèvement sur le reliquat de la loterie. Les monts-de-piété de Lyon et de Nantes sont fondés par décrets impériaux en 1810 et 1813.
Sous la Restauration, on assiste à un nouveau mouvement d’ouverture d’établissements de prêt sur gage : Toulon en 1821, Boulogne-sur-Mer, Reims et Dijon en 1822, Strasbourg, Nîmes et Rouen en 1826 et Toulouse en 1867. Le mont-de-piété de Nancy ouvre ses portes en 1834, et enfin Roubaix se dote de son établissement en 1870.
Riches ou pauvres, tous ont recours au prêt sur gage
Au XIXe siècle, les objets les plus fréquemment mis en gage par la classe ouvrière sont des vêtements, toutes sortes de linges, des matelas, ainsi que des outils et instruments de travail. Les commerçants et petits bourgeois déposent quant à eux des bijoux, des meubles, des pendules…
À l’autre bout de l’échelle sociale, célébrités, grands bourgeois et aristocrates momentanément dans le besoin ont eux aussi recours aux monts-de-piété. Dans certains établissements comme à Paris, ils prennent directement rendez-vous avec le directeur pour ne pas risquer d’être reconnus au « bureau des engagements ».
Dans le registre des engagements secrets, on retrouve ainsi des bijoux de grand luxe, de la dentelle, de l’argenterie, des cachemires…
Même l’un des fils du roi Louis-Philippe, le prince de Joinville, dépose une montre en gage au Crédit Municipal de Paris pour régler une dette de jeu ! Lorsque sa mère, Marie-Amélie de Bourbon-Siciles, s’étonne de la disparition de l’objet, il prétend l’avoir oublié chez… sa tante. « Ma tante » : ce surnom est resté, et désigne aujourd’hui encore les établissements de prêt sur gage.
1918 : la naissance du Crédit Municipal
Au sortir de la guerre, en octobre 1918, les monts-de-piété prennent le nom de caisses de Crédit Municipal. Dans cette période de grande difficulté économique, elles étendent leurs activités aux comptes de dépôt à vue, en complément du traditionnel prêt sur gage.
Plus récemment, la loi du 15 juillet 1992 a confirmé les caisses de Crédit Municipal dans leur statut d’établissements publics communaux de crédit et d’aide sociale.
Le décret du 19 décembre 2008 réaffirme également le monopole de droit public du Crédit Municipal en matière de prêt sur gage.